Sortir Bordeaux Gironde : C'est quoi le « N'importe quoi » ?
Philippe Nicolle (le metteur en scène)
: Ça a l'apparence d'une vraie compétition, avec deux équipes, des arbitres, un gymnase, mais nos sportifs ont de faux sponsors sur le dos et pratiquent des disciplines assez absurdes, poétiques voire totalement burlesques : on a la descente de kayak sur mobilier, le concours de oh non !, le roulidindin, le lancer d'arbitre, le tourteaudrôme, le one-alone happy saut... un peu à la Jackass ou Monthy Python. Les épreuves s'enchaînent suivant un principe de simultanéité propre aux JO, et sur le terrain comme en tribunes, la folie va crescendo, les spectateurs ne sachant pas trop à quoi s'attendre.

Sortir : Comment est né le spectacle ?
P. Nicolle
: Au départ, des échanges, un délire entre nous et puis, à force de cuisine, un spectacle qui en est aujourd'hui à sa 7ème saison (la dernière, genre tournée d'adieu) et plus d'une centaine de représentations. L'idée à la base consiste à s'amuser avec quelque chose de sérieux, faire entrer le chaos dans le temple de l'ordre, tout en amenant les gens à se poser les questions du théâtre, dans son sens même, et de l'absurde. Par exemple, mettre une balle au fond d'un filet, pour certains c'est très sérieux, alors que pour d'autres ça semble complètement absurde.

Sortir : Le tout dans un gymnase...
P. Nicolle
: On avait besoin d'une atmosphère commune, d'un lieu qui parle à tout le monde : le gymnase avec sa résonance particulière, son odeur de sport, ses vestiaires, ses néons utilitaires, ses panneaux de points, ses coups de sifflet, son côté respect des règles du jeu. Ça permet de toucher et impliquer un public plus large, familial et transgénérationnel, du cultureux au populaire. Le jugement, c'est le public : l'enjeu de la compétition, c'est d'être bon par rapport eux. Également une manière de démystifier le théâtre, inaccessible dans l'esprit de certains.

Sortir : Un décalage propre à la compagnie...
P. Nicolle
: Décalage ? Ouais, ça me va plutôt bien. Ça fait 15 ans que la compagnie existe, avec un nouveau spectacle tous les deux ans environ : on a d'ailleurs pas mal tourné sur Bordeaux l'an passé avec un gros canular dérivé d'une pièce de Shakespeare, en attendant un music hall l'an prochain... Un côté décalé exprimé également à travers un théâtre de rue plus militant : lors des manifestations de droite en 2003, à l'époque des intermittents, toute la compagnie s'est habillée genre droite très dure, histoire de pousser la logique de droite jusqu'à la caricature. On travaille beaucoup sur ce côté là.